Interview de M. Jérôme DURAIN, nouveau président de la région Bourgogne-Franche-Comté à Terre de Jade le 7 septembre à Andelnans (90)
Le nouveau président de la Région Bourgogne Franche-Comté a réservé sa première visite officielle à l’agriculture à l’occasion de la finale régionale de labour, le 7 septembre, à Andelnans dans le Territoire de Belfort.
Vous venez d’être élu à la tête de la Région. Quels sont vos objectifs, les actions prioritaires et la méthode que vous souhaitez privilégier pour le conseil régional de Bourgogne Franche-Comté ?
Je m’inscris dans la continuité de Marie-Guite Dufay qui avait des racines rurales. Elle était très attachée aux questions agricoles.
L’un des chantiers qui me tient particulièrement à cœur est l’attractivité de notre région. L’attractivité extérieure, bien sûre, mais aussi l’attractivité vis-à-vis de nous-mêmes, qui y vivons. Face à ceux qui passent leur temps à ne pointer que ce qui ne va pas, au risque de devenir des anti-ambassadeurs de nos territoires, je veux opposer un discours qui porte haut les couleurs de notre région, en s’appuyant sur les fiertés de nos territoires. Le conseil régional a un rôle de chef de file pour le développement de notre région.
Comme je l’ai indiqué lors de mon élection, les motifs de fierté de notre région sont nombreux ; nous le savons tous. Mais, ce qui m’importe, c’est que tous les Bourguignons et les Francs-Comtois en soient conscients et mettent en valeur ces réussites, au-delà des frontières de notre région.
Je n’oublie pas l’agriculture car nous sommes fiers de notre agriculture qui façonne les paysages par des produits de qualité qui font rêver bien au-delà de notre région avec : les nombreuses appellations viticoles (Côte-de-Beaune, Maranges, Pouilly Fumé, Chablis, Savagnin,…), mais aussi les orges de brasserie, les blés panifiables réputés, les cerises de Fougerolles,… sans oublier le secteur animal avec les Charolais de Bourgogne, le Comté, le Gruyère, le Brillat Savarin, la cancoillotte ou les escargots de Bourgogne, les filières porcine, avicole, ovine, caprine, équine,…
Au niveau de la méthode, nous avons des politiques solides que nous allons poursuivre, mais nous avons besoin de simplification, de proximité et de dialogue. Cette proximité et ce dialogue existent au niveau politique, mais ils doivent aussi se traduire concrètement dans le suivi des dossiers administratifs, pour une meilleure compréhension des dispositifs gérés par la Région.
Je m’engage donc à ce que notre collectivité soit davantage encore tournée vers ses usagers et qu’elle s’investisse pour plus de simplicité, d’accompagnement et de souplesse dans le déploiement de ses actions.
Vous étiez sénateur de la Saône-et-Loire, un département très rural qui garde un potentiel agricole important comme tous les départements de la région.
Les agriculteurs sont inquiets par rapport au contexte économique de plus en plus difficile, mais aussi à cause des incompréhensions persistantes sur leurs pratiques. Pourtant, la souveraineté alimentaire et nos capacités de production restent un enjeu stratégique majeur pour notre région, pour notre pays, qu’en pensez-vous ?
Bien entendu, le développement économique concerne aussi le secteur agricole. L’accélération du dérèglement climatique est également au centre des préoccupations. Elle appelle des réponses structurelles qui ne soient pas fondées sur le bricolage et le déni. 25 jours de canicule, cet été, dans les secteurs les plus touchés. Agriculture, biodiversité, forêts, mobilités, qualité de vie : les impacts du dérèglement sont partout. Notre majorité a fait le choix de ne pas regarder ailleurs et d’y répondre avec ambition ; nous poursuivrons dans cette voie.
Enfin, la santé des consommateurs, basée sur des approches scientifiques, est l’une des responsabilités de l’action publique sur laquelle, nous ne pouvons pas tergiverser dans l’intérêt de tous.
Il y a eu des grosses difficultés avec le transfert de compétences de l’État en Région sur les mesures non surfaciques du plan de développement rural 2023 – 2027 (RDR4) avec les fonds FEADER. Si le RDR3 est bouclé, non sans difficulté, la date de paiement des dossiers déposés de la nouvelle programmation reste un sujet de préoccupation pour les agriculteurs concernés. Quelles mesures comptez-vous prendre (sur le plan politique et au niveau de l’organisation) pour que ces difficultés ne soient plus qu’un lointain souvenir ?
On a mis les bouchées doubles pour se sortir de la crise du RDR3, avec le soutien aussi des DDT pour épurer les dossiers restés en souffrance et assurer les paiements avant la fin de l’année.
Pour le RDR4 (nouvelle programmation), les premières versions de l’application Euro.pac pour le module de paiement devraient être disponibles en octobre, pour le versement des aides aux investissements (bâtiment et matériel,…) au début de l’année prochaine.
Au niveau du rythme de consommation des crédits, la plupart des mesures ont une trajectoire normale. Certaines mesures peuvent être réabondées et c’est l’objet d’un remaquettage très prochainement.
Il y a aussi, sur ces questions, un enjeu de méthode. Dans ce domaine, je propose de mettre en place des référents par département afin d’avoir un interlocuteur clairement identifié pour les porteurs de projets, les accompagnateurs.
Sur un sujet comme les fonds européens, les liens avec les conseils départementaux sont importants car ils sont co-financeurs de plusieurs mesures. Les chambres d’agriculture apportent un soutien au montage des projets. Comment envisagez-vous l’implication de ces différents partenaires ?
Je ne suis pas inquiet. Depuis ma prise de fonction, j’ai eu un contact avec pratiquement tous les présidents des conseils départementaux. On n’a pas évoqué que les sujets agricoles, mais ils ont tous un état d’esprit de dialogue.
La proximité, je la vois aussi avec les élus locaux qui sont autant de moteurs pour nos territoires, en construisant une relation renouvelée autour d’actions communes.
Une proximité avec les acteurs locaux, économiques, agricoles doit se traduire concrètement par un dialogue approfondi autour des politiques régionales.
La préparation de la nouvelle PAC 2028-2034, se précise. Habituellement, ce travail se faisait en concertation avec l’État en région, la Région et la profession. La première ébauche de cette réforme a été validée par la Commission européenne. Quelle sera votre approche par rapport à cette échéance cruciale pour l’agriculture de notre région ?
Moi, je suis pour reconduire ce qui a bien fonctionné. Tout s’est bien passé pour la dernière PAC. Il faut donc repartir sur les mêmes bases. Pour l’instant, le cadre général n’est pas encore complétement stabilisé. Les règles seront moins favorables pour nos régions. Les arbitrages se feront au niveau national et européen. Notre seule chance, de pouvoir garantir une réforme de la PAC prenant en compte nos spécificités, sera de travailler ensemble Région, État en région et Profession.