Dans le cadre du 7ème programme de la directive nitrates, l’administration a préparé, en catimini, un nouveau classement des zones vulnérables. Pour ce nouveau zonage, la Bourgogne Franche-Comté dérouille avec plus de 950 nouvelles communes proposées au classement. Pour une région avec plus 1 million d’hectares d’herbe, une agriculture extensive, la présence de polycultures élevage, avec de nombreuses pratiques favorables à l’environnement, cette proposition est difficilement compréhensible et nécessite une analyse rigoureuse pour ne pas se tromper de cible ni d’objectif.
Calendrier resserré pour faire avaler la pilule
Fort de l’expérience du dernier zonage, la DREAL Bourgogne Franche-Comté pensait pouvoir faire une proposition de nouveau zonage, au dernier moment, pour ne pas laisser à la profession le temps de préparer des argumentaires. Ce zonage mérite pourtant une sérieuse contre-expertise. C’était sans compter sur l’expérience du réseau des Chambres d’agriculture qui a travaillé à l’arraché (en quelques semaines, en pleine période de fêtes de fin d’année), pour transmettre un diagnostic et un argumentaire solides remettant en cause le classement de nombreux territoires.
Ce travail fastidieux a été néanmoins riche d’enseignements et démontre le manque de sérieux scientifique pour déterminer ces classements en zone vulnérable. Si parfois, force est de constater qu’il y a une évolution des pratiques agricoles et la nécessité de conduire des actions de prévention, dans de nombreux cas aussi, il suffit d’un prétexte ou deux pour classer allégrement une vingtaine de communes d’un territoire (2 mesures positives sur 17).
A ce jour, la prise en compte de ce travail, réalisé par la profession, sérieux et rigoureux, n’est toujours pas connue. Silence radio, de la part de la DREAL Bourgogne Franche-Comté, ainsi que des DREAL de Bassin. Il faut dire qu’avec trois DREAL de Bassin pour gérer le dossier en Bourgogne Franche-Comté, la simplification administrative a encore du chemin à faire.
Il est aussi très difficile de pouvoir être entendu par des décideurs éloignés des territoires concernés. Dans ce domaine sensible, la concertation et la transparence n’ont jamais été un des points forts de l’administration. Les derniers zonages avaient été remis en cause par les tribunaux administratifs pour manque de concertation avec le syndicalisme agricole. Si, cette fois, il y a un peu plus d’échanges, ce n’est pas pour autant que les demandes de la profession soient réellement prises en compte : l’information n’est pas toujours synonyme de concertation !
Compte tenu des enjeux pour ces territoires, il aurait été judicieux d’affiner un peu plus les analyses avec plusieurs consultations, avant d’attendre le verdict suprême pris dans un bureau à Lyon, Paris ou Orléans, très éloignés des territoires concernés comme Verchamp, Luzy ou Charrey-sur-Saône.
Un peu plus de rigueur scientifique pour être plus efficace !
Concrètement, concernant le classement des masses d’eau souterraines, la profession demande une meilleure compartimentation, en particulier, quand qu’il y a un seul qualitomètre déclassant, alors que de nombreux autres sont présents sur la masse d’eau avec une qualité très correcte.
Ou parfois, il y a, par exemple, un seul qualitomètre déclassant, mais il est non représentatif de la masse d’eau.
Au sujet des masses d’eau superficielles, il faut exclure les communes concernées par des cours d’eau touchés par des apports de nitrates d’origine non agricole (secteurs urbanisés, stations d’épuration mal réglées,…). Quand il y a une à deux mesures légèrement supérieures à 18 mg/l, avec des explications montrant le caractère exceptionnel, la commune n’a pas à être classée. Les secteurs très herbagers, avec de très forte sécheresse, avec des dépassements exceptionnels lors du retour de fortes pluies, ne doivent pas être doublement pénalisés par un contexte climatique défavorable. Dans certaines régions, les surfaces en prairie sont en progression, le cheptel diminue, les cours d’eau d’eau ont des débits inférieurs à la normale. L’amplitude des valeurs augmente alors que la moyenne diminue sur l’année.
Quelle est la rigueur scientifique, quand il est proposé de classer des secteurs avec seulement deux analyses sur les 12 initialement prévues dans les procédures ?
Des demandes précises de la profession : ce n’est pas la mer à boire !
La profession demande aussi de ne pas prendre les valeurs exceptionnelles dues au climat, de prévoir des campagnes de mesures sur quatre ans en travaillant sur des moyennes ; ce qui permettrait d’éviter l’effet climat.
Le recours au percentile 90 consiste à prendre en compte la valeur non dépassée par 90 % des résultats. Cette méthode doit permettre d’écarter les valeurs accidentelles. Lorsque la campagne ne comporte que dix mesures ou moins, la teneur en nitrates à retenir est, par contre, la valeur maximale. Avec ce raisonnement, il est facile de classer les zones les plus extensives de France, frappées par la sécheresse !
Dans de nombreux secteurs, les pratiques agricoles se sont améliorées. Dans le Charolais, notamment, les surfaces en herbe ont augmenté, le chargement des vaches à l’hectare a baissé.
Seules les sécheresses très tardives, en particulier celle de 2018, exliquent les pics de nitrates hivernaux élevés, qui sont liés à l’incapacité des prairies fortement dégradées d’absorber les nitrates qui ont été lessivés au moment du retour des pluies.
Quels leviers efficaces pour améliorer la qualité de l’eau
Compte tenu de ces constats, le classement des zones extensives ou des secteurs en polycultures élevage ne permettra pas d’apporter des réponses adaptées aux situations identifiées.
Ces exploitations, reconnues par l’extensivité de leurs pratiques et déjà fortement fragilisées par le contexte économique et les sécheresses successives, n’auront pas la capacité économique de réaliser les mises aux normes qu’imposera un classement en zone vulnérable.
Vouloir élargir le classement des communes en zones vulnérables, coûte que coûte, devient difficile à expliquer dans les campagnes, alors que les quelques variations des taux de nitrates ne sont pas dues aux pratiques agricoles. Il est temps que les services chargés de la mise en œuvre de ces procédures proposent de réelles concertations pour trouver des réponses adaptées à la spécificité des territoires et la complexité des phénomènes agronomiques, biologiques et naturels.
Les paysans travaillent bien, beaucoup, avec passion et sont en droit d’attendre de celles et ceux qui ont été élus pour prendre des décisions, que ces dernières soient équilibrées, responsables et respectueuses des agriculteurs et de leurs familles.
Des dispositifs végétalisés permanents de 5 à 50 m, mais en fonction des cultures et des spécialités commerciales !…
Les DVP obligatoires, en bordure de cours d’eau, s’immiscent progressivement dans les AMM des produits phytosanitaires, en plus des nombreuses règles de l’arrêté phyto.
De 5 m à potentiellement 50 m, le plus souvent de 20 m, ces dispositifs en herbe font fi du travail sur les ZNT et BCAE des cours d’eau, que les agriculteurs ont mené de concert et en toute transparence avec l’administration.
Mettre 20 m de bandes enherbées, simplement au cas où l’une des cultures de la rotation aurait besoin d’un des produits concernés par un DVP de 20 m, représente, à titre d’exemple, 5 000 ha de terres arables en moins pour un département comme la Côte d’Or. Une paille, si l’on en croit certains de nos détracteurs.
Encore une surtransposition dans la réglementation phyto, qui va à l’encontre de notre compétitivité, de la souveraineté alimentaire de la France, pour un résultat tout à fait discutable en termes de protection des milieux, compte tenu de tout ce qui existe déjà dans la réglementation applicable aux phytos… Ça suffit !